Que faire taire, pour que quelque chose advienne?

Né en 1950 , j'ai découvert la peinture à 19 ans et décidé de devenir peintre après deux étés passés à suivre l'enseignement d'un peintre d'origine flamande, Marc Stockman. Le désir de peindre m'a été transmis oralement par ce peintre, pédagogue de surcroît, qui m'a déclaré, au moment où je m'y attendais le moins, que j'étais peintre. De cette parole est née la décision d'aller à la rencontre de l'art sans attendre d'autres autorisations. J'ai ainsi commencé à interroger les œuvres des musées et collections, convaincu que les réponses aux questions qui s'ouvraient à moi me seraient données par les œuvres elle mêmes et au delà par leurs auteurs.
Cette rencontre m'a ouvert la voie de la relation avec tous les arts, sans considération de temps ou de frontières, et j'ai pu commencer à interroger tous les artistes et entamer le dialogue avec leurs œuvres sans être interrompu par l'urgence des courants et des idéologies. J'ai compris que si la peinture est sortie depuis longtemps des cadres que chaque époque lui enjoignait de respecter, c'est qu'elle existe autant par rapport aux renoncements dont elle est faite que par les signes qu'elle crée .

J'ai compris qu'en peinture, plus encore que ce que l'on met, c'est ce qu'on laisse qui compte ; c'est l'onde qui se répercute plus ou moins loin de son point de départ pour ouvrir des perspectives et de l'espace spirituel à ceux qui la reçoivent. Si la figure humaine s'est imposée tout de suite comme le centre de mon travail et continue de tenir la même place plus de quarante ans plus tard, ce n'est pas en tant que sujet, mais en tant que support qui me relie à la fois à la relation au vivant, à l'autre et à l'art, qu'il soit primitif, classique, ou contemporain.
Que dire en peinture n'est pas une question qui m'occupe, mais plutôt que faire taire, pour que quelque chose advienne? Cette question me guide depuis le premier jour et me porte d'œuvre en œuvre, vers une certitude sans objet.